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Cinéma

Congrès FNCF 2018 - Cédric Aubry : "Trouver une réponse au renouvellement pérenne de nos équipements implique toute la filière"

Date de publication : 25/09/2018 - 08:45

Dans la foulée d'un été morose, le président de la branche moyenne exploitation de la FNCF fait le point sur les conséquences de cette fréquentation déclinante sur ses membres, non sans aborder l'épineux dossier de l'après-VPF, les suites de la réforme art et essai, les engagements de promotion ou encore, plus largement, les rapports du secteur avec le CNC.

L’an dernier, vous exprimiez dans nos colonnes vos craintes que la réforme art et essai "impacte financièrement une grande partie" des salles classées des catégories C, D et E, en raison de l’instauration de seuils-planchers, tout en pointant du doigt un possible déclassement pour certaines. Un an plus tard, à froid, quel regard portez-vous sur cette réforme ?
Je reste très critique. Tout d’abord, le CNC demande à une partie de l’exploitation (la nôtre) de faire des efforts, mais ne lui donne pas les outils pour y parvenir. À ce jour, même sur la flambant neuve application du CNC, il est impossible de connaître sur l’année de référence écoulée son pourcentage de séances. La moyenne exploitation a accepté du bout des lèvres cette réforme à la seule condition d’avancées significatives dans la transparence des informations de classement : l’art et essai n’est pas réservé à un clan d’initiés. Le classement a priori n’est pas actif dans sa globalité, même si l’Afcae semble avoir nettement amélioré les choses depuis quelques mois. Les éditeurs de billetterie n’ont pas livré de mise à jour avec les informations art & essai, le CNC n’étant pas capable de les fournir rapidement. Dans ce contexte, la moyenne exploitation refusera fortement que toute salle soit exclue du classement parce qu’elle n’a pas atteint le seuil demandé. Nous sommes également très critiques quant à la répartition des subventions, clairement très défavorable aux cinémas de six salles et plus. L’augmentation de l’enveloppe globale ne se fait pas en faveur des salles de la moyenne exploitation, qui ont pourtant modernisé leurs cinémas en y ajoutant des salles. La valorisation des labels en est très représentative. Nous serons donc très vigilants au moment du prochain classement.

Vous aviez également indiqué l’an passé que "la moyenne exploitation ne se sent pas assez épaulée dans son quotidien", tout en insistant sur le fait que "le CNC doit s’interroger sur le soutien qu’il lui apporte". Cette analyse a été partagée lors des différentes assemblées générales de syndicats, où plusieurs exploitants ont pointé un durcissement des rapports avec le Centre. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Le CNC est plein de bonnes intentions, mais reste très loin du compte dans son approche économique de notre secteur. Non seulement il ne nous épaule pas assez mais, pire, il complexifie notre quotidien à travers des mesures qui n’ont que très peu d’impact pour la filière. Les engagements de programmation en sont l’exemple parfait. L’entrée des six et sept écrans ne verra en réalité qu’une vingtaine de cinémas supplémentaires souscrire de nouveaux engagements, les autres étant déjà affiliés à des groupements de programmation. Ces 20 cinémas ne vont, bien évidemment, avoir aucun impact sur la filière. On veut également systématiser des contrats écrits deux semaines avant la sortie. La mesure ne peut avoir de sens que pour un technocrate derrière un bureau. Je ne parle même pas de la problématique de la multidiffusion ! L’exploitation entrepreneuriale se trouve, du coup, entravée par des mesures qui alourdissent son quotidien.

Dans ce cadre, que vous inspire la création d’engagements de promotion pour les exploitants soumis aux engagements de programmation ?
Je suis très surpris par le vif intérêt du CNC sur les engagements de promotion. Tous les rapports, dont ceux du CNC, démontrent que les salles placent en avant-séance de nombreuses bandes-annonces gratuites, des affiches dans les halls… et ce depuis toujours. La moyenne exploitation est très vertueuse quant à la promotion gratuite des œuvres, avec ou sans décret !

Le sujet de l’après-VPF a peu bougé depuis le précédent Congrès, si ce n’est à travers la mise en place, au printemps, de l’Observatoire sur la situation économique de la petite et la moyenne exploitation, dont vous faites partie. Êtes-vous satisfait des premières réflexions qui en découlent ?
L’observatoire s’est en effet mis en place très tardivement. Je pense que le CNC a enfin compris qu’une réponse doit nous être apportée. Économique, j’entends ! La spécificité de l’exploitation française, sa diversité, son maillage, son engagement à défendre notre cinématographie n’a aucun égal au monde. Trouver une réponse au renouvellement pérenne de nos équipements est un enjeu de politique d’aménagement du territoire et implique toute la filière. Nous venons tout juste de faire des propositions de mécanisme de financement à l’observatoire. Le CNC doit donner maintenant ses orientations afin de dégager des budgets.

Un nouvel accord relatif à la chronologie des médias a été signé par la plupart des organisations professionnelles, même si, à l'heure de notre bouclage, sa validation reste suspendue à la reconduction des accords Canal+ et OCS. Si cette nouvelle chronologie est validée, en seriez-vous satisfait ?
La réforme de la chronologie implique toujours, par définition, que l’exploitation ait des choses à concéder. Nous restons le premier financeur de la filière cinéma. La fenêtre salle doit donc être sanctuarisée. J’espère seulement que la dérogation ne va pas fragiliser les salles art et essai et les plus petites exploitations.

Quel regard portez-vous sur l’action gouvernementale à l’encontre du piratage, auquel sera consacrée la table ronde du Congrès cette année ?
En toute honnêteté, la plupart des mesures que le CNC cherche à prendre pour la filière sont la résultante des méfaits du piratage. Ces mesures servent juste à écoper un navire qui prend l’eau de toutes parts parce que la question du piratage n’est pas prise à bras-le-corps. Le gouvernement doit agir fermement, même si c’est impopulaire. La France dispose d’un maillage de salles unique au monde et d’un marché du film national fort, qui font sa spécificité. Le piratage reste avant tout le fléau qui met à mal nos équilibres. Le gouvernement doit comprendre que si la France perd son maillage de salles et sa large représentativité de films nationaux, cela sera également très impopulaire.

La fréquentation a plongé drastiquement durant l'été. Est-ce une source d’inquiétude ou uniquement d’ordre conjoncturel selon vous ? Comment cette chute a-t-elle été ressentie dans la moyenne exploitation ?
Les derniers mois ont, en effet, été catastrophiques. Pour la moyenne exploitation, nous essayons de nous rassurer en nous disant qu’il ne s’agit là que d’aléas conjoncturels. Il faut cependant noter que nombre de nos collègues ont commencé à s’alarmer de leur trésorerie dès la fin du mois d’août ! Il faut donc que le CNC se rende compte de la très – voire trop – grande importance des investissements dans la moyenne exploitation. Je fais parfois le parallèle avec la crise des subprimes ! Si le ralentissement venait à se prolonger, nous serions très rapidement impactés. Le CNC doit en prendre compte dans ses arbitrages.

L’année écoulée a été le témoin d’un renforcement de la concentration du parc français, notamment illustré par le rachat de Cap’ Cinéma – groupe essentiellement constitué de moyennes exploitations – par CGR. Cela vous inquiète-t-il ?
Le monde économique tend globalement à la concentration, l’exploitation ne déroge pas à la règle. Le CNC doit par contre se demander pourquoi les acteurs de la moyenne vendent quasi exclusivement à des groupes. La moyenne exploitation répond souvent en exclusivité à l’offre cinématographique d’une agglomération. Elle doit être encouragée. La moyenne exploitation reste une force vive et entrepreneuriale. Je suis persuadé que les prochaines années vont voir émerger une nouvelle strate d’exploitation dans les plus petites agglomérations, qui viendra garnir les rangs de la moyenne exploitation. Le CNC doit nous accompagner.

Propos recueillis par Kevin Bertrand
© crédit photo :


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