Cinéma

Eric Lagesse (Pyramide) : "On sent une vraie solidarité"

Date de publication : 20/03/2020 - 10:03

Le dirigeant de Pyramide Distribution avait décidé de maintenir ses films à l’affiche jusqu’à l’annonce de fermeture des salles. Retour avec le distributeur indépendant, et coprésident de DIRE, sur la crise et ses effets sur le secteur.

Jusqu’à la fermeture des salles, vous avez décidé, chez Pyramide Distribution, de maintenir vos films à l’affiche. Et notamment Les parfums, prévu au 25 mars. Pourquoi ?
Nous avons beaucoup discuté avec producteurs et réalisateur, et avons décidé que tant que qu’il n’y avait pas d’empêchement total, nous maintiendrions la date. La sortie des Parfums représente beaucoup d’investissements déjà faits, et nous nous disions qu’il y aurait toujours l’occasion d’annuler la sortie si les salles fermaient. Enfin, et surtout, il y avait aussi la volonté d’être solidaires avec les exploitants, de tout faire pour garder les cinémas ouverts.

En tant que distributeur indépendant, sera-t-il possible de reconduire tous les investissements engagés à la période de sortie décalée ?
Cela représente des frais importants, mais la plupart des régies et fournisseurs jouent le jeu. On sent une vraie solidarité, et beaucoup pensaient que la stratégie était bonne et qu’il fallait tenter et aller jusqu’au bout. Nous espérons que la plupart des investissements peuvent être en partie couverts et reportés. Mais le plus dur demeure ce qui n’est pas rattrapable, c’est-à-dire la couverture et les partenariats médias, les interviews, les mises en avant… Du moment qu’ils ont été publiés en février/mars, ils ne repasseront à une autre date. Nous avons engagé beaucoup d’efforts pour générer une notoriété qui ne pourra peut-être plus servir les films. Reste aussi à savoir ce qui va se passer ensuite, quelle sera la bonne date pour chaque film, et surtout, quelle concurrence en face ?

Vous êtes également coprésident du DIRE, sur quoi portent les échanges au sein du syndicat ?
A l’heure où nous parlons, nous réfléchissons aux différentes mesures qui pourraient être mises en place, par les pouvoir publics, pour soutenir le secteur et les acteurs. Nous relevons toutefois que le CNC est très réactif lors de nos échanges, et fait tout pour dégager des solutions d’aide.

Quelles pistes de réflexion avez-vous évoquées auprès du CNC ?
Elles sont nombreuses et ne s’appliquent peut-être pas à tout le monde. D’ordre général, nous avons en effet parlé des possibilités d’adaptation exceptionnelle de la chronologie des médias, et notamment pour les films sortis en salle ces dernières semaines. Nous en serions favorables pour laisser le choix aux distributeurs impactés de passer leur film directement en VàD. L’idée est surtout de dégager ensemble des solutions que pour que l’impact de la crise sanitaire soit le moins lourd possible sur la structure économique des sociétés qui avaient des films en exploitation à cette période. Car elles ont souvent acheté les droits très cher, engagé de nombreux frais de promotion… Chacun doit tirer le bilan de ses frais et les transmettre au CNC, afin qu’il mesure au mieux l’ampleur du désastre et dégage les meilleurs outils de soutien pour y répondre. En termes d’intensité, ce sont surtout les sorties des 11 et 18 mars qui ont été les plus impactées. Celles du 25 mars accusent certes, déjà, un gros manque à gagner, mais qu’il serait encore possible de rattraper ou, du moins, d’atténuer.
En cela, l’aide institutionnelle pourrait aussi prendre la forme d’une aide au programme revitalisée, d’un fonds de soutien dopé... Ce ne sont que des pistes de réflexion, à ce stade. Le CNC affirme sa juste volonté d’aider le secteur et de soutenir les distributeurs dans l’épreuve. Il a toujours été un soutien important pour nous, il serait étonnant qu’il ne continue pas à aller dans ce sens.

Les dispositions gouvernementales annoncées pour alléger les sociétés, notamment en termes de charges sociales et de mise en chômage partiel des effectifs, sont-elles suffisantes pour les distributeurs indépendants ?
Oui, a priori, elles paraissent suffisantes pour atténuer l'impact sur les structures. Mais cela doit servir de base à un mécanisme de soutien plus large, et nous comptons notamment sur le CNC pour l’ajuster au mieux. Concernant la mise en disponibilité des effectifs, nous étudions évidemment l’option au cas par cas, car certains de nos collaborateurs, et notamment ceux qui sont en contact direct avec les salles, se retrouvent désœuvrés. Certains peuvent évoluer en télétravail, sur les sorties à venir ou les lancements vidéo notamment. Mais d’autres, au niveau de la programmation, des partenariats, du trade marketing, voient leurs fonctions réduites à néant ou presque. Ces dispositifs en place forment donc des options, mais il faut aussi en développer d’autres.

Propos recueillis par Sylvain Devarieux
© crédit photo : DR


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