Télévision

Discop Africa Abidjan 2016 : Le Sénégal entend garder la maîtrise

Date de publication : 31/05/2016 - 10:40

Le pays, qui occupe une place prépondérante dans l'écosystème numérique en Afrique de l'Ouest, est plus que tout autre concerné par les enjeux de souveraineté liés aux bouleversements du secteur des médias et de l’audiovisuel.

Comme dans l’ensemble de la région, le paysage audiovisuel sénégalais a été totalement bouleversé en dix ans par la multiplication des radios et des chaînes privées. Une croissance qui a notamment entraîné un regain d’intérêt pour le wolof au détriment du français, une envolée des programmes religieux et de ceux consacrés à la lutte, sport très populaire au Sénégal. Encore peu structuré, le secteur peut compter sur un tissu de jeunes entrepreneurs très actifs, notamment dans le domaine des applications utilisables à partir de téléphones mobiles. Un domaine d’intervention pas si éloigné qu’il n’y paraît, de prime abord, du périmètre audiovisuel, bien au contraire. Toutes ces entreprises contribuent en effet à favoriser l’émergence et le développement d’une économie du numérique profitable également à l’audiovisuel en lui apportant nouvelles plateformes et nouveaux usages. Et comme partout ailleurs, le besoin de contenus se fait pressant.

Au moment de la célébration de l’anniversaire des 40 ans de la télévision publique sénégalaise en 2013, tout le monde s’accordait sur le fait qu’elle abordait une période charnière de son histoire. Même si le Sénégal est un pays démocratique, la tutelle du Ministère de la Culture et de la Communication sur la La Radio et Télévision du Sénégal (RTS) peut s’avérer parfois pressante, et ce en dépit de la présence d’instances de régulations. De facto, la RTS a été toujours proche du pouvoir en place. Un peu trop sûre de son fait, elle n’a réagi que tardivement à l’arrivée de nouveaux diffuseurs et se trouve aujourd’hui très distancée en termes d’audience. L’ensemble du pays, qui est loin d’être couvert n’a bénéficié pendant longtemps que de la seule RTS1 avant que n’apparaisse brièvement en 2003, RTS2 qui deviendra une chaîne privée trois ans plus tard. RTS 3 et RTS 4 ne sont en fait que des décrochages locaux en Casamance et à Tambacounda.

Conformément à ses engagements, le Sénégal a fait officiellement son entrée dans le monde de la TNT le 17 juin 2015. Sur le terrain, la réalité est toute autre. L’installation des décodeurs se fait au ralenti et le groupe Excaf Télécom qui a remporté l’appel d’offres, en coiffant au poteau de puissants concurrents internationaux, est accusé d’avoir bénéficié de clauses d’exclusivité particulièrement avantageuses en échange de sa prise en charge financière du chantier du passage au numérique. Résultat, un diffuseur comme Canal + Sénégal pourrait devoir attendre 2025 avant de commencer à commercialiser des bouquets TNT.

Quoi qu’il en soit la RTS se trouve face à une carte majeure à jouer : occuper pleinement le nouvel espace offert par la TNT. Et sa tutelle semble l’encourager à mettre les moyens. Ce n’est pas un hasard si la délégation attendue au Discop cette année sera particulièrement importante. Autre signe encourageant, le Sénégal est en train de mettre en place un cadre juridique qui encourage et protège les auteurs puisqu’une société de gestion des droits d'auteurs et des droits voisins a été créée fin 2013. Quant aux artistes et professionnels de la culture, ils vont se voir doter d’un statut et d’un cadre réglementaire spécifique. Autre atout majeur, le secteur privé. Celui-ci joue depuis longtemps un rôle clé dans le financement des différents secteurs culturels via des actions de mécénat qui gagneraient à être encouragées par le biais de dispositifs incitatifs adaptés, notamment en termes de fiscalité. Car les contenus de demain, qu’ils soient publics ou privés, supposeront de gros efforts d’investissements pour être attractifs.

Patrice Carré, avec le service audiovisuel régional de l'Ambassade de France à Dakar
© crédit photo :


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