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4 ÉVÉNEMENT

[Exploitation]

L’étude commandée par le CNC LA BAISSE
à Vertigo fait apparaître plusieurs
DE LA
freins à la moindre venue
des Français en salle depuis leur FRÉQUENTATION,

réouverture, perte d’habitude, UN PHÉNOMÈNE
prix du billet, développement MULTIFACTORIEL
des plateformes et offre de films
insuffisamment attractive en tête. avec un nombre d’entrées moyen par spectateurs en repli de les offres de VàDA ont évidemment joué un rôle important
Avec l’idée d’en faire le point 64% entre 2021 et 2017-2019, contre 41% pour l’ensemble dans cette moindre venue des spectateurs en salle, via une
de départ d’une réflexion plus du public. progression fulgurante des abonnements pendant la crise
large entre les différents acteurs sanitaire, mais aussi “un élargissement (de leur) public vers
LE PRIX DU BILLET, PRINCIPAL des cibles plus âgées”. Toutefois, la “consommation est
de la filière. ■ KEVIN BERTRAND FREIN CHEZ LES 35-59 ANS surtout orientée vers les séries”, qui captent plus des deux
tiers de la durée de visionnage mensuelle, contre environ
Pourquoi les Français vont-ils moins sou- Ce sont ces données chiffrées que le Centre a souhaité 20% pour le cinéma. “L’interprétation optimiste que l’on
vent au cinéma ? C’est pour répondre à mieux comprendre en confiant une étude à Vertigo. peut avoir de cela, c’est qu’une cohabitation entre les pla-
cette interrogation, de plus en plus pré- Première information : 48% des sondés déclarent aller teformes et le cinéma est possible dès lors que l’expérience
gnante au sein de la filière ces derniers moins souvent (34%) ou plus du tout au cinéma (14%) salle est conservée”, a signalé Magali Valente. Plus délicate
mois, que le CNC a commandé une depuis la réouverture du 19 mai 2021, quand 52% y vont à appréhender car tributaire de la date à laquelle la question
étude à Vertigo, réalisée du 2 au 6 mai. autant (43%) ou plus (9%). Une fois ces 48% interrogés sur a été posée, le manque d’attractivité de l’offre de films est
Objectif : “Comprendre pourquoi la fré- les raisons de leur moindre ou non-retour en salle, “cinq notamment plus fort chez les 60 ans et plus et les CSP+.
quentation n’a pas retrouvé son niveau raisons majeures” apparaissent : la perte d’habitude, à Parmi les spectateurs ayant déclaré aller moins souvent
d’avant-crise et identifier les freins en fonction des diffé- 38% ; le prix du billet trop cher, à 36% ; l’absence d’envie ou plus du tout au cinéma, les comédies (42%) et les films
rents publics en objectivant la situation”, a indiqué Cécile de porter le masque, à 33% ; la préférence pour le vision- français (39%) arrivent en tête des films qui pourraient leur
Lacoue, directrice des études, des statistiques et de la pros- nage de films sur d’autres supports, à 26% ; et le manque donner envie de revenir en salle. Côté événements, les son-
pective du CNC, en introduction de la table ronde consacrée ou l’absence d’envie suscitée par les films proposés, à 23%. dés citent loin devant “des événements proposant des prix
à la reconquête et au renouvellement des publics organisée “C’est la conjugaison de plusieurs de ces facteurs, pour réduits”, à 24%, soit deux fois plus que son dauphin, les
par le Centre le lundi 23 mai à Cannes. L’occasion pour certains conjoncturels, pour d’autres structurels, qui fait “événements autour de la salle de cinéma”, à 11%.
cette dernière de rappeler le contexte inédit de ces deux que les Français vont moins souvent au cinéma”, a résumé
dernières années, marqué par 300 jours de fermetures, Cécile Lacoue. “Cela démontre qu’il y a non seulement LA FRÉQUENTATION, “CHANTIER
une multitude de contraintes sanitaires et une ribambelle une conjugaison de facteurs, mais aussi une forte perméa- PRIORITAIRE DU CNC”
de décalages de films. D’où une baisse appuyée de la fré- bilité entre eux. Aucun critère ne se détache réellement.
quentation, mesurée à -55% entre 2019 et 2021. Malgré La réponse ne pourra donc être que globale, et non très En conclusion, le CNC identifie quatre “leviers pour
“plusieurs rebonds encourageants” et des “résultats qui ciblée”, a souligné Magali Valente, directrice du cinéma du reconquérir le public et recréer les habitudes”. Il pointe
redonnaient le sourire” fin 2021, Cécile Lacoue a pointé CNC. Reste que l’importance de ces freins varie fortement d’abord la “réflexion à mener sur l’offre en salle, la pro-
“un début 2022 plus que décevant”. Cette année, les salles selon l’âge des sondés. La préférence pour le visionnage grammation, et comment donner envie aux jeunes de voir
ont ainsi vu leurs entrées chuter, par rapport à la moyenne de films sur d’autres supports (36%) arrive ainsi en tête des films français, des films d’auteur”. Puis évoque “une
de 2017-2019, de 42% en janvier, 41% en février, 30% en chez les 15-34 ans, tandis que les 35-59 ans évoquent en expérience à revaloriser, notamment face aux plateformes”
mars et 23% en avril, premier mois plein sans restrictions premier lieu le prix du billet (46%), et les 60 ans et plus autour de la “premiumisation des salles” et de “l’expérience
sanitaires depuis deux ans. Pour autant, ce recul n’est pas la perte d’habitude (51%). Comme déjà mis en lumière sociale”. Il mentionne également des “offres ou événements
uniforme. Côté salles, d’abord, où il atteint sur cette période dans l’étude Afcae-Ifop (cf. FF du mercredi 18 mai 2022), tarifaires, s’adressant notamment aux 35-59 ans”. Et, enfin,
-28% chez les indépendants contre -64% pour les circuits. “une meilleure exposition et promotion des œuvres, à travers
Côté spectateurs, ensuite, où les 15-24 ans ont été plus Cécile les leviers du marketing et de la data”. “Nous ne prenons
nombreux – par rapport à leur classe d’âge – à revenir en Lacoue pas cette étude comme une bible, mais comme un point
salles, tandis que les 25-49 ans ont connu “une baisse non et Magali de départ avec de grandes indications, sans interprétation
anticipée”. Le CNC relève en outre “une fréquentation deve- Valente définitive”, a souligné Magali Valente. Et Olivier Henrard,
nue plus occasionnelle, notamment chez les 25-34 ans”, (CNC) ont directeur général délégué du CNC, de conclure: “La fréquen-
présenté, tation dans les salles est le chantier prioritaire du CNC. Nous
© CNC ce lundi ne croyons pas à la fatalité, nous entendons sur ce sujet
23 mai porter une volonté politique sans faille. Nous pensons que la
à Cannes, solution ne passe pas que par les exploitants, elle interroge
l’étude en réalité toute la filière, à partir du premier maillon, qui est
de Vertigo celui de l’écriture. Dès aujourd’hui, à la lumière des résultats
consacrée que nous venons de vous présenter, nous allons commencer
aux raisons à réfléchir, avec le secteur, le CNC, et au plus haut niveau
de la de l’État, aux moyens de faire revenir les amoureux en salle
moindre en reconstruisant un désir et une habitude dans le mode de
venue vie des Français.” ❖
des Français
au cinéma. www.lefilmfrancais.com
Retrouver l’étude détaillée.

24 mai 2022
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