Page 22 - LFF4_web
P. 22

22       LES FILMS DU JOUR






                Un certain regard
                LIBERTÉ

                LES VERTUS DU VICE
                Trois ans après avoir présenté en séance  spéciale,
                en hommage à Jean-Pierre Léaud, La mort de
                Louis XIV, qui lui a valu le prix Jean-Vigo en
                2017, le metteur en scène catalan Albert Serra
                est de retour à Cannes avec une évocation très
                  personnelle du réalisateur allemand Rainer  Werner
                  Fassbinder (1945-1982), à travers la mise en abyme
                d’une pièce d’Albert Serra jouée en février 2018 à
                la Volksbühne de Berlin. Il y décrit le libertinage
                auquel s’adonnent quelques nobles, leur déprava-
                tion leur ayant valu de se voir  chassés de la cour
                de Louis XVI. Ils entreprennent alors de  rallier à
                leur débauche l’Allemagne puritaine. Cette copro-
                duction hispano-franco-portugaise compte parmi
                ses interprètes l’acteur fétiche d’Albert Serra, son
                presque homonyme Lluís Serrat, qui a déjà incarné
                Fassbinder dans deux autres de ses films : Les trois
                petits cochons (2012) et le court métrage Cuba libre
                (2013). Liberté marque aussi le retour au premier
                plan du comédien autrichien Helmut Berger, à la                                                                             © 3B PRODUCTIONS-PICTANOVO, LES FILMS DU LOSANGE
                veille de ses 75 ans. Nommé en 1970 au  Golden
                Globe du meilleur espoir masculin pour  Les
                  damnés, il a été couronné d’un David di Donatello
                spécial pour Ludwig (1973), tous deux réalisés
                par Luchino Visconti. Plus récemment, on l’a vu
                en 2014 à Cannes dans Saint Laurent de Bertrand
                Bonello dans le rôle du couturier vieillissant.     Un certain regard
                                                                    JEANNE
                                            J.-P. G.

                                                                    LE BÛCHER DES VANITÉS
                                                                    Grand prix du jury à Cannes pour L’humanité en 1999, puis pour Flandres en 2006, Bruno Dumont s’est fait
                                                                    remarquer dès La vie de Jésus, Caméra d’or en 1997. Adepte d’un cinéma radical qui s’accommode d’une
                                                                    certaine spiritualité, il revendique sa filiation avec Robert Bresson, qui a réalisé Procès de Jeanne d’Arc
                                                                    (1962). C’est, quant à lui, dans l’œuvre de Charles Péguy qu’il a puisé. “Lorsque j’ai commencé à avoir l’idée
                                                                    de faire un film musical, explique-t-il, je cherchais un texte réellement propice, aussi je me suis rapproché
                                                                    naturellement de lui et de sa pièce de théâtre Jeanne d’Arc comme d’un livret. Mon film précédent, Jeannette
                                                                    [prix SACD et label Europa Cinéma à la Quinzaine des réalisateurs 2017, Ndrl], racontait l’enfance de Jeanne
                                                                    et était l’adaptation de la première partie de la pièce, qui s’appelle Domrémy. Jeanne en est la suite et adapte
                                                                    les deux autres parties : Les batailles et Rouen.” Après avoir collaboré depuis Camille Claudel 1915 avec le
                                                                    chef opérateur Guillaume Deffontaines (nommé au César pour Ma Loute en 2017), le réalisateur l’a remplacé
                                                                    par le collaborateur habituel de Louis-Julien Petit, David Chambille. “Le film rend compte d’une expérience
                                                                    du temps présent, explique Dumont, où l’objectif est de faire entrer le spectateur, l’élever, l’aspirer vers
                                                                    quelque chose qui, certes, nous dépasse, mais infuse. Cependant, il faut trouver la bonne balance avec lui,
                                                                    s’adapter à la modernité dans laquelle il vit, chercher une connexion. Lorsque je fais le choix de Christophe,
               © ROMANYNAN                                          par exemple, pour composer la partition et interpréter une chanson, ou lorsque je choisis la jeune Lise Leplat
                                                                    Prudhomme, qui a dix ans, pour incarner une Jeanne adolescente à la fin de sa vie, cela participe des liens
                                                                                                                                       J.-P. G.
                                                                    que je tisse avec notre présent : rechercher des analogies et des correspondances.”






                Un certain regard
                PORT AUTHORITY



                UNE QUESTION D’IDENTITÉ
                La documentariste américaine Danielle Lessovitz signe avec Port
                Authority son premier long métrage après une demi-douzaine de courts,
                de Repetitive Acts (2008) à Neon Heartache (2013), et des contribu-
                tions à l’écriture du court métrage documentaire d’Ethan Goldwater
                LP (2015) et du film de Vladimir de Fontenay Mobile Homes, montré à
                la Quinzaine des réalisateurs en 2017. Elle y raconte le coup de foudre
                d’un jeune homme pour une femme qui s’avère être un transsexuel
                et réunit à cet effet l’acteur  britannique Fionn Whitehead, vu en 2017
                dans Dunkerque de  Christopher Nolan et My Lady de Richard Eyre,                                                            © MADELEINE FILMS-RT FEATURES-SIKELIA PRODUCTIONS
                et le mannequin transgenre américain Leyna Bloom. Cette romance
                moderne a bénéficié de subventions du Film Lab de Turin, de Cinéma
                du monde et du Conseil des arts de New York. Avec pour producteurs
                délégués Martin  Scorsese, Sophie Mas et Lourenço Sant’Anna, sous
                la houlette de Rodrigo Teixeira et Virginie Lacombe.     J.-P. G.
                18 mai 2019
   17   18   19   20   21   22   23   24   25   26   27