Cinéma

Annecy 2022 - Pour le SPI, il est temps de lancer une concertation sur le développement

Date de publication : 17/06/2022 - 08:11

Outre la nécessité de mieux financer les œuvres et de garantir le financement de l’audiovisuel public, le SPI entend s’engager sur la question de l’exposition des œuvres et se pencher sur le problème du développement.

Dans un communiqué de presse, le SPI a rappelé que ses adhérents présentaient cette année en compétition 7 longs métrages, 14 courts métrages, 6 œuvres audiovisuelles, 3 films de commande, 2 œuvres VR, 5 Work in Progress et 12 pitchs. "Cette sélection record reflète le dynamisme du collège Animation, créé en 2018 et représentatif depuis cette année au sein de la branche de la production de films d’animation".

Présent, pour la première année, parmi les exposants au Mifa, le SPI a renouvelé son partenariat avec "France in Shorts", dispositif dédié au court métrage d’animation, en collaboration avec l’Afca, l’Agence du court métrage et AnimFrance. Et, comme chaque année, il a été présent pour ses adhérents, notamment au travers de rencontres dédiées et d’un cocktail.

Le syndicat, rappelle le communiqué "a mené une réflexion et émis des propositions, d’ores et déjà entendues par le CNC, parmi lesquelles, une réforme de l’aide à la création visuelle et sonore (CVS) qui favorise les spécificités de l’animation au travers d’une commission dédiée, la suppression de la majoration créée en 2018 et la réintégration de l’enveloppe correspondante de 1,5 M€ au sein de l’aide. La deuxième est l’introduction d’une définition claire de l’œuvre d’animation dans le Règlement général des aides afin que les dispositifs puissent répondre aux besoins propres".

Comme le précise Emmanuel-Alain Raynal (Miyu Poductions),vice-président animation "le secteur de l’animation française se porte plutôt bien avec un volume de production qui augmente et une véritable reconnaissance mondiale", mais la vigilance reste de mise sur un certain nombre de questions, à commencer par celle de la convention avec les plateformes qui a tant fait couler d’encre en décembre dernier, au regard de la faiblesse des clauses de diversité. "Elles ont certes le mérite d’exister, puisque nous sommes le seul pays dans le monde à en avoir, mais leur niveau n’est pas du tout représentatif du poids de la filière de l’animation" explique Emmanuelle Mauger, déléguée générale adjointe du SPI. D’où la nécessité de relancer un nouveau dialogue avec ces différents acteurs.

"Si le secteur est en pleine santé c’est aussi grâce à un carnet de commandes très rempli, notamment avec des fabrications pour des propriétés intellectuelles de plateformes. C’est à saluer tout en veillant à ne pas devenir un territoire uniquement dédié à cela" poursuit Emmanuel-Alain Raynal. "Par ailleurs notre création a une spécificité en France et en Europe. C’est ce qui la rend unique. Il ne faut donc pas être obnubilé par la volonté de concurrencer ce qui peut se faire aux Etats-Unis ou au Japon, mais aussi rester concentrés sur ce qui nous singularise".

Certes le cinéma d’animation visant un public adulte a réussi enfin à se frayer un chemin, mais il reste encore de nombreux écueils en termes de financement, notamment du fait que les chaînes investissent encore très peu, chaque diffuseur hertzien intervenant sur un seul film par an. "Seulement un ou deux films d’animation par an destinés à un public adulte sont accompagnés par une chaine hertzienne. Or les projets et les talents sont là, ce n’est donc qu’une question de financement. De manière plus large une réévaluation du crédit d’impôt est nécessaire pour mieux accompagner notre cinéma" souligne le producteur.

Par ailleurs, la réforme du financement de l’audiovisuel public fait peser une hypothèque sur le budget futur de l’audiovisuel public. Car, comme le rappelle le syndicat "France Télévisions, investit chaque année au moins 32 M€ dans l’animation. C’est notre premier partenaire. Une stratégie de développement numérique parallèle au maintien d’une offre linéaire a été déployée depuis trois ans. Un travail en faveur de la diversité est amorcé, y compris en matière de visibilité ultra-marine. Ce renforcement éditorial passe par une garantie du financement de l’audiovisuel public, de manière pérenne et indépendante. Il s’agit d’un chantier prioritaire pour les producteurs indépendants. Nous serons aux côtés de madame la ministre Rima Abdul Malak et des parlementaires pour défendre l’avenir de notre création, véritable actif stratégique pour la France".

Par ailleurs le SPI "estime que les chaînes privées doivent davantage être au rendez-vous pour financer l’animation française reconnue internationalement". Outre la nécessité de réenclencher un dialogue avec les plateformes sur les clauses de diversité, le syndicat estime que" La fusion à venir des chaînes TF1 et M6 doit également représenter une opportunité pour l’animation française et non une réduction des budgets et de la prise de risque éditoriale".

Par ailleurs le SPI demande à présent au CNC de lancer une grande concertation autour du développement. "Il en va de la diversité de nos œuvres, de la lutte contre la concentration de notre secteur et de la préservation d’un écosystème où chaque société, chaque créateur, doit avoir sa place".

"Notre problématique est que nous, producteurs indépendants, disposons de très peu de guichets pour le développement au CNC" explique Emmanuel-Alain Raynal. "Il y a beaucoup de leviers pour les sociétés installées, ce que nous ne contestons pas, notamment la passerelle audiovisuelle vers le long métrage, assortie de bonifications liées au fonds de soutien. Mais globalement pour les sociétés qui n’y ont pas accès c’est beaucoup plus compliqué. Et je ne parle pas seulement des sociétés de productions émergentes. Pour pouvoir prétendre à l’aide au développement cinéma, il faut déjà avoir produit un certain nombres d’œuvres définies. Et du côté audiovisuel, le FAIA est extrêmement sélectif et en même temps très sollicité. Or nous produisons des œuvres dont le développement coute cher, puisque par exemple pour un long métrage il faut compter entre 200 000 € et 400 000 €. Mais nous disposons de très peu de solutions lorsque nous n’avons pas d’accès a ces fonds de soutien. A titre d’exemple, Miyu Productions représente actuellement 10 permanents, quatre studios, 130 postes d’animation, 10 longs métrages en portefeuille, trois en production et deux séries et trois unitaires en développement avec des chaines. Notre société existe depuis 13 ans mais nous n’aurons pas de fonds de soutien important ni de compte automatique avant encore trois ans. La mise en production d’une œuvre audiovisuelle ou cinématographique c’est en moyenne 7 ans de travail".

Un problème spécifique à l’animation et qui concerne même des sociétés de taille moyenne ayant déjà mis en place une stratégie. Car cet accès tardif au fonds de soutien est lié à la temporalité particulière du secteur. "Si un nouveau plan de soutien devait être mis en place pour l’animation, il faudrait qu’il porte notamment sur cette question du développement" appuie Emmanuel-Alain Raynal. "Car des œuvres mieux financées durant cette phase sont plus fortes quand elles entrent en production et cela va dans le sens du renouvellement des talents et des sociétés et de la diversité de nos productions".

Patrice Carré
© crédit photo : DR


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