Cinéma

Rachida Dati : "Aider la filière de l'animation à surmonter cette crise est un impératif industriel et culturel"

Date de publication : 12/06/2025 - 08:39

Dans une tribune publiée dans Le Film Français, la ministre de la Culture appelle notamment à modifier "la portée du décret SMAD dans le champ de l’animation".

"Alors que le Festival international du film d’animation d’Annecy bat son plein, je souhaite lancer un appel fort en faveur du renforcement de notre politique publique pour ce secteur si particulier, stratégique pour notre pays à plus d’un titre.

L’animation est d’abord un genre dans lequel la France excelle. Les créateurs français produisent des œuvres qui s’exportent très bien et rayonnent dans le monde entier, grâce à des titres phares comme Grizzy et les Lemmings ou Miraculous, pour ne citer qu’eux. Cette excellence est d’ailleurs saluée tous les ans par les plus prestigieuses récompenses – comme l’a montré encore récemment l’Oscar attribué à Flow, une production Sacrebleu.

L’animation française est un véritable fleuron industriel de notre pays, particulièrement dynamique et qui repose sur des fondements solides, au premier rang desquels un écosystème de formation, de création et de fabrication ancré sur tout le territoire, grâce au soutien essentiel des régions. Dans le top 50 des meilleures écoles internationales pour l’animation, 9 sont françaises et le monde entier s’arrache les professionnels qu’elles forment. C’est un résultat remarquable, dont nous pouvons être fiers.

Enfin, l’animation est le genre préféré de la jeunesse et on sait à quel point l’imaginaire des nouvelles générations est le terrain d’une concurrence féroce aujourd’hui. En France, nos enfants ont la chance de pouvoir découvrir des œuvres qui sont d’abord nationales, en salles comme à la télévision ou sur les plateformes : de Arthur à Arcanes, en passant par Samuel – tous d’immenses succès récents dans notre pays. Il y a donc là un enjeu crucial de transmission de notre imaginaire.

Pour toutes ces raisons, ce genre est absolument stratégique, or il traverse aujourd’hui une crise importante due notamment à une contraction des commandes des plateformes. Cette crise est mondiale, elle touche tout particulièrement l’Amérique du Nord, où l’on déplore de nombreuses fermetures de studios et destructions d’emplois. La France n’est pas épargnée et de nombreuses sociétés sont aujourd’hui fragilisées. Aider la filière à surmonter cette crise est un impératif industriel et culturel.

A ma demande, le CNC a déjà aménagé ses dispositifs depuis le début de l’année pour aider les studios d’animation à continuer à développer leurs projets et à partir en production en dépit de ce contexte difficile.

Aujourd’hui, c’est la portée du décret SMAD dans le champ de l’animation que je souhaite modifier. En imposant des obligations d’investissement aux plateformes dans la création française, ce décret a permis en 2021 leur pleine intégration au sein de notre écosystème.

L’Arcom et le CNC ont dressé un premier bilan de ce décret à l’automne dernier, qui démontrait son succès. Il apportait toutefois une nuance à cette réussite, qui concernait justement l’animation. En effet, alors même que ce genre constitue une offre déterminante dans les choix d’abonnement des familles et dans la fidélisation des abonnés, il ne représente aujourd’hui qu’un volume d’obligations très marginal pour les plateformes étrangères. En outre, celles-ci privilégient le rachat de programmes existants plutôt que le financement de nouvelles œuvres.

Je veux donc que nous puissions combler cette faille du décret en fixant au bon niveau les obligations en matière d’animation et en les orientant vers des œuvres inédites. Il est également essentiel de donner à ce secteur, qui a été pendant quinze ans le premier à l’export, la capacité à valoriser ses œuvres dans des pays étrangers où les droits n’ont pas été acquis par les plateformes.

C’est pourquoi j’ai demandé un aménagement du décret SMAD, ciblé très précisément et exclusivement sur ces points, qui sera notifié à la commission européenne dans les trois prochaines semaines.

Je suis profondément convaincue que l’animation française possède tous les atouts pour non seulement traverser cette crise, mais aussi pour rebondir avec succès.

L’un de ses plus grands atouts est justement le Festival d’Annecy, et son marché, le Mifa, qui fête cette année ses 40 ans.

Ce Festival et ce marché, structurants pour toute la filière, l’Etat, à travers le CNC, est fier de les accompagner depuis leur origine. Aujourd’hui, le Festival d’Annecy pousse l’ambition encore un cran plus loin en portant le projet de Cité internationale du cinéma d’animation, qui proposera une offre culturelle à l’année, avec notamment un musée, une salle de projection, des résidences d’artistes, et une vraie volonté d’accueillir tous les publics et de développer des activités d’éducation artistique et culturelle.

Là encore, l’Etat via le CNC a été présent dès la genèse du projet et je m’engage à ce que ce soutien en phase d’amorce se pérennise en soutien en fonctionnement, pour faire d’Annecy et de son territoire la capitale mondiale de l’animation pendant toute l’année.

Je souhaite que cette Cité puisse réunir le plus de partenaires publics possibles, parce que le Festival d’Annecy et son marché sont la preuve par l’exemple qu’un territoire qui investit dans la culture, c’est un territoire qui vit, qui vibre – en termes d’emplois, en termes de retombées économiques, en termes de rayonnement et d’image et, au-delà, en termes de relations humaines, de cohésion sociale.

Pour notre jeunesse, pour nos créateurs, pour notre économie, pour nos territoires, défendons tous ensemble une politique ambitieuse pour l’animation."

Rachida Dati
© crédit photo : Ministère de la Culture


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