Cinéma

Cannes 2017 : Entretien avec Vladimir de Fontenay réalisateur de "Mobile Homes"

Date de publication : 21/05/2017 - 08:20

Le jeune cinéaste, qui a déjà réalisé un film court du même titre, présente ce long métrage, interprété par Imogen Poots et Callum Turner, dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs.

Quelques mots pour vous présenter. D'où venez-vous ?
Je m’appelle Vladimir, j’ai 29 ans. J’ai grandi et vécu à Paris puis en Italie et aux États-Unis à New York. Après des études de sciences politiques et d’économie, j’ai fait quelques stages régie sur des tournages en France et quelques courts métrages avant d’être pris en master de réalisation à la Tisch School of the Arts de la  New York University où j’ai reçu la bourse Steven J. Ross ainsi que celle du directeur artistique de l’école, Spike Lee. C’est là que j’ai réalisé mes court métrages et notamment What Lies Beneath the Sky narré par Chantal Akerman et Mobile Homes en 2012.
 
Comment êtes-vous venu au cinéma ?
C’est un peu flou pour être honnête. Mon père m’emmenait peindre au Musée de la Marine quand j’étais petit et me montrait beaucoup de vieux films. Je découvrais des mondes, des personnages, des couleurs et les films qui avaient agité sa jeunesse et celle de ma mère. Le cinéma nous faisait nous chamailler ou nous retrouver sur une multitude d’émotions alors que nous avions 30 ans d’écart et des vécus différents. Je trouvais ça très fort.
Et puis, j’ai commencé à faire beaucoup de rétrospectives un peu partout dans Paris où l’offre est énorme. Le théâtre et surtout la photographie ont commencé à avoir une place importante dans mon quotidien et je suis tombé amoureux d’une jeune comédienne bien plus cinéphile que moi au côté de qui ma passion pour le cinéma a grandi.
Plusieurs années après, alors que j’étudiais à Milan, je me suis inscrit à un cours du soir de cinéma à la Scuola Civica avec Michelangelo Frammartino et j’ai commencé à sécher les cours pour faire des films. Mon premier court métrage était une catastrophe, mais je ne pouvais plus faire machine arrière.
 
Comment présentez-vous "Mobile homes" en quelques mots ?
Mobile Homes est né d’une image, celle d'un mobile home sur la route aux États-Unis qui me dépasse un jour en voiture. Toute une contradiction. Une maison mobile. Elle a donné naissance à un court métrage qui sera le point de départ de l'histoire d'Ali, une jeune mère un peu déboussolée qui préfère l'horizontalité de la fuite sur la route avec son copain, à la verticalité de l'enracinement et des responsabilités que lui impose la garde de son enfant. Dilemme que la promesse vendue par le mobile home semble dénouer. Sauf que la réalité est bien plus compliquée. Le court métrage correspond plus ou moins au premier acte du film mais nous plongeait dans un univers différent.
 
Votre personnage, c'est avant tout celui d'une femme qui se prend en main…
Ali se laisse un peu porter par la vie avec l’homme qu’elle aime sans trop se soucier des autres autour d’elle, et finit par le payer cash. Pour son fils, qui en est la première victime, elle doit vite faire un choix entre sa liberté et sa responsabilité de mère.
 
Comment avez-vous développé votre scénario ?
J’ai repris le scénario de mon court métrage là où je l’avais laissé et j’ai avancé avec les personnages pour voir où ils allaient et comment ils s’en sortiraient. Je l’ai fait seul puis avec la collaboration d’une camarade de NYU, Danielle Lessovitz, avec qui nous avons retravaillé les personnages et leur environnement. J’ai, par la suite, fait beaucoup de recherches, et les repérages ainsi que l’appropriation des personnages par les acteurs ont beaucoup altéré le scénario.
 
Comment avez-vous rencontré vos producteurs ?
Le court métrage a beaucoup tourné en festivals, et à la suite d’une projection que j’avais faite à la SACD, on m’a présenté Frédéric de Goldschmidt qui a été assez fou pour donner sa chance au projet et me faire confiance. Éric Dupont est venu pour nous aider à développer le scénario, explorer la piste du Canada et produire sur place avec Mike MacMillan. Virginie Lacombe a rejoint Frédéric et renforcé l'équipe de son expérience. De l’écriture à la livraison, quatre années se sont écoulées.
 
Vous aviez des envies de mise en scène, des besoins précis ?
Beaucoup, et elles impliquaient souvent les transports de mobile homes, des animaux, des enfants, l’eau... ce qui, d’un point de vue de la logistique et des assurances, est un véritable casse-tête. Il y a, au milieu du film, une scène de cascade terriblement compliquée pour un film de notre échelle. J’ai un peu bataillé car cela semblait irréalisable mais tout le monde a fini par se serrer les coudes et les producteurs se sont battu à mes côtés pour y parvenir.
 
Vous avez dû changer votre scénario, vous adapter ?
Oui et non. J’ai dû m’adapter car on a tourné à la frontière du Canada et des États Unis avec des équipes françaises et canadiennes, ce qui n’était pas vraiment prévu quand j’écrivais mon histoire qui se passait uniquement aux États-Unis. Nous avons eu beaucoup de pépins avec le climat ce qui a affecté la continuité, et puis certaines problématiques de production nous ont forcés à changer de décor.  Mais au final, j’ai eu carte blanche et toutes les scènes que je rêvais de tourner sont à l’écran. Les difficultés que nous avons rencontrées au tournage participent je crois aussi à la tension du film et des personnages.
 
Comment avez-vous composé votre casting ?
Avec l’aide de Susan Shopmaker, qui est une directrice de casting, dont j’adore le travail à New York. Elle a organisé une rencontre à Londres avec Imogen et nous avons été convaincus, elle et moi, que nous devions faire ce film ensemble. Susan connaissait Callum Turner mais c’est Imogen qui me l’a vraiment fait découvrir. Leur complicité dans la vie depuis Green Room m'a convaincu que je croirais en leur couple à l'écran. Pour l’enfant, je voulais un petit garçon qui n’avait jamais joué. Mon seul impératif c’était qu’il ait grandi dans une ferme car il devait être à l’aise avec les animaux.
 
Quand et comment s'est déroulé le tournage ?
Le premier jour de tournage il faisait -35°, tout le monde était gelé et nos voitures glissaient dans les ravins. Nous avons eu les tempêtes de neige, les accidents, les blessures… Nous avons dû retourner trois mois après le tournage et il n’y avait plus de neige. J’ai fait des repérages dans le nord du Canada pendant des semaines pour pouvoir continuer à tourner. Au final, il y a eu beaucoup de post-production.
 
À l'arrivée, le film est-il conforme à ce que vous aviez en tête au départ ?
Oui, il est conforme à l’idée de cinéma que j’avais en tête, et à la structure narrative du scénario. Pour ce qui est des personnages, des lieux, des images, des situations, beaucoup de choses se sont aussi créées sur le moment avec mon équipe et mes comédiens dans les décors qui s’offraient à nous. J’aime quand rien n’est jamais vraiment figé et que le scénario se métamorphose progressivement au tournage.
 
Qu'attendez-vous de cette sélection à la Quinzaine ?
C’est avant tout l’occasion de communier avec l’équipe et les comédiens qui n’ont pas tous encore vu le film. Et si on arrive à embarquer un maximum de gens dans cette aventure qui nous habite depuis plusieurs années alors ça sera magique.
 
Déjà venu à Cannes  
Jamais ! Il faut que je loue un costume il paraît !

Recueilli par Patrice Carré
© crédit photo :


L’accès à cet article est réservé aux abonnés.

Vous avez déjà un compte


Accès 24 heures

Pour lire cet article et accéder à tous les contenus du site durant 24 heures
cliquez ici


Recevez nos alertes email gratuites

s'inscrire