Cinéma

Lumière MIFC 2020 - Les éditeurs de vidéo physique plus que jamais mobilisés

Date de publication : 14/10/2020 - 08:15

La première journée du Marché du film classique consacrait un après-midi entier à l’édition vidéo du cinéma de patrimoine. L’occasion de revenir sur une initiative qui fédère désormais 85 sociétés du secteur, réagissant aux annonces du plan de relance gouvernemental tout en alertant sur des problématiques renforcées par la crise sanitaire.

Ils étaient 50, les voilà désormais 85. Depuis l’appel du 3 juin 2020, lancé donc par un collectif d’éditeurs de vidéo physique de cinéma classique et dont les rangs ont bien grossi – pour avoir notamment été rejoints par le SEVN –, il apparaissait nécessaire aux acteurs du secteur de faire un point sur les problématiques et les enjeux que ce dernier traverse. Tout en se projetant vers l’avenir. Et en cela, cette journée inaugurale du Marché international du Film classique (MIFC) formait, ce mardi, un écrin idéal pour une tribune en ce sens.

Sur scène, trois représentants développaient la situation tout en animant les débats : Natacha Missoffe, responsable des éditions vidéo chez Potemkine Films, Hugues Peysson, président de l’Atelier d’Image, et Vincent Paul-Boncour, cofondateur et dirigeant de Carlotta Films. L’occasion d’un focus d’une heure dans la salle Karbone du quartier de Monplaisir, entre satisfaction et alerte.

En préambule, Natacha Missoffe a ainsi rappelé les objectifs initiaux du collectif de juin : "Il faut avant tout rappeler la force de notre secteur. Nous mettons en valeur des objets culturels durables, qui ont un intérêt considérable à l’ère du tout dématérialisé (…) où tout le monde n’a pas accès à un débit internet qui permet de profiter des films dans les meilleures conditions, ni l’argent pour s’abonner à toutes les plateformes [VàD] en ligne. (…) Le tout, accompagné d’un travail éditorial démentiel et unique dans la filière. Les DVD, Blu-ray et autres supports UHD représentent tout de même le meilleur moyen de restitution de l’œuvre cinématographique après la salle. Pour assurer la transmission du cinéma, il est important de préserver cela", a déclaré l’éditrice, en rappelant au passage que le collectif représentait à date "près de 90% de notre corps de métier".

Combattre les idées reçues
À son tour, Hugues Peysson a, pour sa part, rappelé que le marché de la vidéo physique "représentait plus de 400 M€" de valeur et qu’il demeurait "totalement dynamique", au contraire de "l’image moribonde" que certaines "idées reçues" renvoyaient. Et notamment chez les pouvoirs publics. "Tout le monde a enfin compris que les baisses [de ventes de supports physiques] concernaient surtout les nouveautés, mais pas du tout le cinéma de patrimoine".

L’éditeur a en outre précisé que, selon les études, "80% des gens qui consomment [les supports physiques] se situent en province. En termes d’accessibilité, 96% des Français peuvent lire un DVD ou un Blu-ray à domicile, largement au-dessus du taux de couverture des plateformes de streaming", non sans pointer que "43% des Français ont acheter un DVD ou un Blu-ray durant le confinement".

L’échange a également abordé la question du renouvellement du public, arguant que le secteur de la vidéo physique de cinéma classique pouvait toujours compter sur un public jeune qui ne fuit pas. "L’obsession actuelle de la filière et des pouvoirs publics demeure les 15-25 ans. Mais pour que ces derniers aillent au cinéma, ce n’est pas à partir de 15 ans qu’il faut les prendre, mais bien avant, pour les former au goût et à l’envie", a déclaré Vincent Paul-Boncour, rappelant que le secteur "touche tous les publics, et peut toucher encore plus de monde en innovant au quotidien".

En outre, la tribune a été l’occasion d’appuyer sur la notion de complémentarité des différents modes de diffusion de l’œuvre cinématographique, en refusant "d’opposer les consommations" du cinéma. "Nous avons la chance de compter parmi nous beaucoup de gens et de sociétés qui sont aussi des ayants-droit ou des distributeurs en salle. C’est inconcevable d’occulter par notre démarche ces consommations. Nous voulons juste éviter d’être sacrifiés à l’ère du dématérialisé numérique et sous le coup de la Covid", a approfondi Hugues Peysson.

"Dans la boucle"
Cet échange dans le cadre du Festival Lumière a aussi permis de rappeler "plusieurs bonnes nouvelles" relative à la mobilisation des pouvoirs publics sur la situation du secteur, et notamment les 800 000 € annoncés au sein d’une enveloppe de soutien supplémentaire dédié, tirée du plan de relance, pour tout projet d’édition sorti après février 2020, ce qui "représente 20% du total de l’aide sélective, au programme et unitaire sur une année, ce qui n’est pas négligeable", a noté Vincent Paul-Boncour. "Nous avons besoin de ce soutien supplémentaire en situation de crise, comme l’exploitation, la production et la distribution cinéma sont aidées. Il était important que l’on soit dans la boucle."

Parmi les chantiers encore en cours pour le collectif, plusieurs sujets ont été mis en avant. À commencer par l’augmentation du "taux d’intensité" sur le cumul des aides publiques au sein du budget d’un projet d’édition actuellement limité à 50%, et qui devrait, en cette période de crise, être porté à "70% voire 80%". "Nous avons aussi demandé à ce que l’année 2021 soit préservée en termes de réformes [du système de soutien], avec une enveloppe budgétaire stable pour tout ce qui concerne la vidéo physique et en ligne", a précisé le dirigeant de Carlotta. Tout en proposant aussi "de s’engager même, dans un deuxième temps, sur 2022 et 2023, afin de nous permettre de continuer à innover, et à exister".

Sylvain Devarieux
© crédit photo : DR


L’accès à cet article est réservé aux abonnés.

Vous avez déjà un compte


Accès 24 heures

Pour lire cet article et accéder à tous les contenus du site durant 24 heures
cliquez ici


Recevez nos alertes email gratuites

s'inscrire