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Cinéma

Lumière MIFC 2020 - Nathanaël Karmitz : "Le patrimoine est au cœur des valeurs de MK2"

Date de publication : 13/10/2020 - 08:20

À l'occasion de la keynote qu'il livrera ce mardi 13 octobre à Lyon en qualité de grand témoin du Marché international du Film classique 2020, le président du directoire de MK2 détaille l'importance que revêt aujourd'hui le cinéma de patrimoine pour le groupe, livrant au passage sa vision sur le rôle des plateformes et des chaînes de télévision dans sa diffusion.

Quelle place le cinéma de patrimoine occupe-t-il aujourd’hui au sein de MK2, tant en termes d’activité que de "philosophie" ?
Sur la philosophie même de MK2, c’est l’un de nos trois piliers fondamentaux. Nous nous définissons à travers trois grandes valeurs : la sélection, l’altérité et la transmission. Le patrimoine correspond à ces trois éléments, et en particulier la transmission. Il est donc au cœur des valeurs du groupe. Ensuite, du point de vue de l’activité, nous représentons aujourd’hui aux alentours de 800 films dans le monde. À ce titre, nous sommes délégataires d’un certain nombre de droits, mais aussi d’une responsabilité puisque, de Chaplin à Truffaut en passant par Kiarostami, Lynch ou Dolan, c’est une partie de l’Histoire du cinéma mondial que nous représentons. Sur le plan purement économique, cela constitue plus de 50% de l’activité de MK2 Films.

Lors du dernier Festival Lumière, vous aviez annoncé une "collaboration poussée de mise en avant de grandes œuvres du patrimoine mondial" avec Carlotta Films. Comment celle-ci s’est-elle traduite au cours de l’année écoulée ? Quelles sont les grandes lignes des mois à venir ?
La grande collaboration de cette fin d’année avec Carlotta, c’est la réédition de cinq films de Claude Chabrol ("L’enfer", "La cérémonie", "Rien ne va plus", "Merci pour le chocolat" et "La fleur du mal", Ndlr) à travers le programme Suspense au féminin. Ils ont été restaurés en 4K, avec de nouvelles affiches, de nouveaux bonus et une nouvelle charte graphique élaborée par l’artiste américaine Akiko Stehrenberger. La sortie en salle est prévue le 25 novembre, l’édition DVD, le 2 décembre. L’exposition autour d’Abbas Kiarostami, du 15 avril au 20 mai 2021 au Centre Pompidou, sera également un grand moment. Pour l’accompagner, nous organiserons avec Carlotta une grande rétrospective de son œuvre en salle, en plusieurs temps. Elle sera appuyée par des éditions DVD et blu-ray éditées par Potemkine Films, avec notamment un coffret totalement inédit, "Les années Kanoun", regroupant des films restaurés que nous avons récupérés auprès de l’Institut Kanoun. En outre, nous prévoyons l’an prochain de grandes opérations autour de Krzysztof Kieslowski, qui aurait fêté ses 80 ans en 2021, ou encore autour de Truffaut l’été prochain.

D’autres événements sont-ils prévus en dehors de votre partenariat avec Carlotta ?
Bien sûr. Nous organiserons notamment une opération internationale le 21 janvier 2021, date anniversaire des 100 ans de la première projection du Kid de Charlie Chaplin. L’idée est de faire en sorte qu’un maximum de salles à travers le monde participe à cette opération et programme le film, qui ressortira en France au cinéma avec Lobster Films. Tous ces projets sont pilotés par Rosalie Varda, qui a rejoint MK2 Films en avril.

Vous travaillez donc avec plusieurs partenaires autour du patrimoine. Celui-ci nécessite-t-il, selon vous, une approche plus collaborative que les autres "segments" du cinéma ?
Nous avons une obligation de collaborer tous ensemble, parce que nous faisons partie d’un seul et même camp, celui des passeurs et des transmetteurs de cinéma et de cinéphilie. C’est en tout cas notre philosophie chez MK2. On ne peut pas mettre d’un côté les cinémathèques puis les exploitants, les éditeurs de DVD, les chaînes de télé... Nous avons besoin de l’ensemble de ces talents pour faire vivre le patrimoine. Nous sommes aujourd’hui confrontés à une "bagarre de l’attention", qui demande beaucoup d’énergie et de moyens. Il est donc nécessaire de créer de grands événements, mais aussi de faire appel à toutes les forces vives qui ont des idées pour les faire vivre.

Comment ce travail s’opère-t-il à l’échelle internationale ?
Les opérations dont nous avons parlé ont leurs extensions partout dans le monde. Nous discutons avec un ensemble de grandes institutions, de musées, de cinémathèques, de salles, d’éditeurs DVD… à travers le globe. Ces opérations partent de France, mais elles sont internationales.

Des événements sont-ils d’ores et déjà prévus à l’étranger ?
Il y en a plein, et pour chacune des opérations mentionnées.

Est-ce, selon vous, la marque d’une appétence forte pour le patrimoine ?
On sent une appétence, mais aussi qu’il faut travailler encore plus qu’avant pour la maintenir, aller chercher les spectateurs un par un… Tout doit être minutieux. C’est pour cette raison que, dès que la situation sanitaire le permettra, nous organiserons à nouveau des événements similaires au Cinéma Paradiso que nous avons installé à La Seine Musicale en juillet. Aujourd’hui, il faut se battre pour donner aux gens envie de sortir et de découvrir de nouvelles choses, ce à quoi participe l’événementialisation du cinéma.

En avril, vous avez conclu un accord avec Netflix pour la mise en ligne en France d’une cinquantaine de titres de votre catalogue sur la plateforme. Pour vous, le développement du cinéma de patrimoine dans le monde passera-t-il à l’avenir par ce type de deal ? D’autres sont-ils dans les tuyaux ?
D’abord, il est important de répéter que c’est un accord parmi d’autres. Ce qu’il est intéressant de noter, c’est la puissance marketing de Netflix. Deux ans auparavant, nous avons initié des accords avec Amazon (Prime Vidéo, Ndlr) portant sur un nombre bien plus conséquent de films, et ils ont beaucoup moins fait parler d’eux. Nous travaillons avec l’ensemble des plateformes du marché : Orange, Canal+, UniversCiné, Salto, Mubi, LaCinetek… Ce dont on peut se réjouir, ce n’est pas que nous avons signé un accord avec Netflix, mais que ce dernier ait changé d’avis. Encore récemment, lorsqu’on leur posait la question du cinéma de patrimoine, de la présence de catalogues sur la plateforme, ils répondaient que ça ne les intéressait pas. Cet accord est un élément visible de ce changement de politique, dont je me suis satisfait et je continue de m'en satisfaire. Cela n’empêche pas de ne pas être d’un optimisme béat, de ne pas adhérer d’un coup à l’ensemble de la politique de Netflix. Concernant d’autres accords, je n’ai rien de plus à annoncer aujourd’hui, même si je souhaite évidemment que cela continue. Suite à la France, et par réclamation populaire, Netflix avait étendu cet accord au Québec. J’espère qu’ils vont continuer, et bien au-delà du Québec, car il s’agit d’une forme de diffusion puissante.

Quid de l’exposition du cinéma de patrimoine à la télévision française ?
On peut se réjouir de l’énorme succès d’Arte, de l’extrême qualité de sa programmation et de sa formidable capacité d’innovation, mais on peut regretter que ce rôle lui ait été dévolu quasi exclusivement à l’échelle du service public. Et que France Télévisions, notamment, ne fasse aujourd’hui plus cette part du travail. C’était le rôle de France 3 il y a encore quelques années, avec d’excellents scores à la clé, mais aussi à chaque fois un discours très ambivalent du type "le cinéma de patrimoine, ça n’intéresse pas, c’est pour les vieux…" Force est de constater, chiffres à l’appui, que c’est faux. C’est une question d’éditorialisation.

Propos recueillis par Kevin Bertrand
© crédit photo : Julien Liénard pour Le film français


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