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Cinéma

Chronologie des médias - François Aymé (Afcae) : "Contre le film jetable, la chrono des médias"

Date de publication : 10/10/2022 - 18:30

Alors que les discussions ont repris la semaine dernière, Le film français a souhaité donner la parole à plusieurs organisations professionnelles et entreprises - parties prenantes ou non desdites discussions - afin qu'elles expriment leur vision de la chronologie des médias. François Aymé, président de l'Afcae, ouvre le bal.

"Il est de bon ton aujourd’hui, dans les médias généralistes, de fustiger la chronologie des médias, un machin compliqué et obsolète qui ferait de la France une exception retranchée sur ses archaïsmes. La France est effectivement une exception, hier comme aujourd’hui, mais une bonne exception. Dans les années 1980, l’Italie démantelait l’un des plus beaux cinémas du monde avec la télévision de Berlusconi à la manœuvre et une absence coupable de régulation. Federico Fellini filmait dans Ginger et Fred la vulgarité de cette télé et la mort de ce cinéma italien que nous avions tant aimé. Aujourd’hui, les pays qui ont bradé leur chronologie des médias, l’Italie (encore) et l’Allemagne en tête, voient leur fréquentation s’effondrer (Italie : - 75%) quand celle de la France résiste (- 30%).
 
Un chiffre ? Un marché des films art et essai d’environ 30 millions d’entrées sur l’année écoulée dans l’Hexagone, quand il est sous les 10 millions en Allemagne. Il faut le redire et sans doute le réexpliquer : la chronologie des médias est une nécessaire régulation qui incite chaque fenêtre de diffusion à investir dans la production et à avoir un périmètre d’exclusivité qui lui permet d’atteindre un équilibre financier. Mais ce n’est pas que cela. C’est aussi une triple garantie sur l’avenir tellement évidente que l’on se demande pourquoi il faut le rappeler. Une garantie pour la pérennité d’une œuvre. C’est tout le contraire d’une exploitation éphémère sur les plateformes. L’algorithme c’est le pays des oubliettes. En passant successivement en salles, en VàD, sur les chaînes payantes puis gratuites, un film retrouve à chaque fois une nouvelle vie, non pas au fil des semaines mais des années ! Supprimer la chrono des médias, c’est revenir au temps du cinéma forain où les bobines n’avaient de valeur que le temps éphémère de leur première exploitation. Le "tout-tout-de-suite", c’est le retour des "contenus" jetables.
 
La seconde garantie de la chrono, c’est un accès large et démocratique aux œuvres, ce qui n’est tout de même pas rien. Nous avons vécu pendant des décennies avec l’idée que, au même titre que les meilleurs livres sont accessibles pour tous en librairie ou en bibliothèque, les meilleurs films sont accessibles, à un moment ou à un autre, en VàD ou sur les chaînes gratuites et non pas réservés à des abonnés payants.
 
Enfin, la chrono des médias, c’est la meilleure garantie de la diversité. La diversité des diffuseurs = la diversité des films. Et la diversité des films, c’est comme pour la gastronomie, c’est la garantie du plaisir, l’éveil des sens. La créativité artistique est-elle soluble dans la rentabilité immédiate des contenus ? On risque de se poser rapidement la question si l’on dérégule à tout va. L’Afcae défend une chronologie qui s’appuie sur les principes précités, ce qui n’empêche absolument pas négociation et évolution. Au contraire. À la seule condition que le long terme et l’intérêt général des œuvres et du public prévalent sur quelques intérêts privés de court terme."

François Aymé
© crédit photo : Isabelle Nègre


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