Cinéma

Lumière MIFC 2025 - [Entretien] György Ráduly : "Le cinéma hongrois mérite d’être mis en lumière"

Date de publication : 15/10/2025 - 08:13

La Hongrie est le pays à l'honneur pour cette édition 2025 du MIFC. L'occasion pour György Ráduly, directeur des archives cinématographiques de l'Institut national du film de Hongrie et fidèle participant du marché, de décrire la politique ambitieuse et proactive du pays en faveur du patrimoine.

Après Annecy, la Hongrie est à nouveau à l'honneur cette année à travers le Festival Lumière et son marché. Comment expliquez-vous cette reconnaissance pour le cinéma hongrois ?

La reconnaissance croissante du cinéma hongrois, que ce soit à Annecy ou au Festival Lumière, témoigne d’un intérêt renouvelé pour une cinématographie riche et profondément ancrée dans l’histoire européenne. C’est aussi le fruit d’un travail collectif : les institutions, les talents, la production contemporaine, la préservation, la restauration, ainsi que nos efforts pour sauvegarder la technologie photochimique, tant pour la production que pour la conservation. La formation cinématographique nationale et notre coopération avec les écoles jouent également un rôle essentiel pour valoriser le cinéma de patrimoine auprès du jeune public. Je crois profondément que ce cinéma, qui a connu de nombreux âges d’or et qui contribue sans cesse au cinéma mondial depuis déjà 125 ans, mérite d’être mis en lumière.

Vous interviendrez sur la table-ronde "Un modèle inversé : des actions concrètes pour la mise en valeur du patrimoine cinématographique hongrois". Concrètement, qu'entend-on par modèle inversé et comment se caractérise votre politique en matière du patrimoine ?

Si je veux donner une explication a ce titre, ce modèle représenterait un choix entre deux chemins : attendre les conditions idéales pour présenter les œuvres, ou travailler avec les ressources disponibles dès maintenant. Depuis 2017, nous avons entamé un processus de développement des archives du film au sein de l’Institut National du Film, avec une vision panoramique claire de nos objectifs. Heureusement, les financeurs de la culture considèrent également important de préserver le patrimoine cinématographique, c’est pourquoi nous disposons de ressources financières nettement plus importantes qu’auparavant. J’ai pris la décision de planifier le développement des archives tout en rendant accessibles les œuvres déjà exploitables, afin de stimuler l’intérêt du public et des professionnels. Ma politique repose sur trois piliers : la modernisation et la consolidation de la collection; la coopération continue entre les archives et le laboratoire pour mener à bien les projets de numérisation et de restauration; la présence active de notre patrimoine à travers des partenariats nationaux (réseaux de cinémas, chaînes de télévision, notre propre plateforme VOD, activités scolaires, notre festival Budapest Classics Film Marathon) et internationaux (partenariats, distribution, festivals).

Depuis un an, nous avons élaboré un projet pour la création d’une Cinémathèque à Budapest, qui serait un lieu central pour présenter la richesse de notre patrimoine cinématographique. Mais nous n’attendons pas la création de ce lieu pour fédérer notre audience : nous souhaitons le créer pour un public déjà existant et fortement demandeur. Je pense que les collègues du Festival Lumière ont probablement pensé à cette stratégie lorsqu’ils ont choisi le titre de cette conférence.

 István Szabó sera mis à l'honneur. Quel regard portez-vous sur sa filmographie ?

István Szabó est une figure incontournable du cinéma hongrois et mondial. Sa filmographie est marquée par une profonde humanité, une réflexion sur l’identité et l’histoire, et une maîtrise narrative exceptionnelle. Depuis 2005, lorsque j’ai commencé à travailler sur le cinéma de patrimoine hongrois en France avec Simon Shandor (Clavis Films), je collabore régulièrement avec István Szabó et ses films.

Nous avons d’abord édité sa trilogie en DVD en France, puis travaillé avec les salles et les cinémathèques pour faire revivre son cinéma, tout comme celui d’autres grands talents hongrois tels que Béla Tarr, Márta Mészáros, Zoltán Fábri, Károly Makk ou Miklós Jancsó, à qui nous avons consacré un coffret DVD de dix films. Les œuvres d’István interrogent les dilemmes moraux et les tensions politiques avec une rare intensité. Mais les films Meeting Venus et Adorable Julia, que le Festival Lumière présentera en première internationale en présence d’István, témoignent aussi de son extraordinaire talent à exceller dans des genres cinématographiques variés et à créer des œuvres grandioses qui touchent également le grand public. En tant que gardiens du patrimoine, nous avons la responsabilité de transmettre son héritage aux générations futures, dans toute sa complexité et sa beauté.

Florian Krieg
© crédit photo :


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