Télévision

Festival de la Fiction 2023 - Compétition officielle : focus sur "L'enchanteur"

Date de publication : 15/09/2023 - 08:50

Produit par 247 Max (Médéric Albouy, Xavier Rigault et Marc-Antoine Robert) cet unitaire mis en scène par Philippe Lefebvre en Compétition est une proposition très originale autour de Romain Gary et du tourbillon médiatique que provoqua "l'affaire" Emile Ajar en 1975. A l'écriture, deux romanciers, Maria Pourchet, dont le dernier livre Western est un événement de cette rentrée littéraire. Et François-Henri Desérable, remarqué cette année pour L’usure d’un monde, récit de son périple de 40 jours au sein de l’Iran au plus fort du soulèvement anti-régime. Rencontre avec les deux scénaristes.

Juste après la parution de La vie devant soi à la rentrée 1975, Romain Gary (joué par Charles Berling) fait incarner Emile Ajar par son petit cousin Paul Pavlowitch (Pierre Perrier). Tout le monde tombe dans le panneau. Sauf Adèle (Claire de La Rüe du Can) une jeune étudiante originaire de Nice (où Gary a passé une partie de son enfance), fraîchement montée à Paris pour étudier la littérature à la Sorbonne, qui est persuadée qu’Émile Ajar et Romain Gary sont un seul et même écrivain. Elle va le trouver là où il vit l’écrivain, pour le confronter. C'est le sujet de cet unitaire destiné à France 2, écrit par Maria Pourchet et François-Henri Desérable et réalisé par Philippe Lefebvre. Il voit également Miranda Raison et Anne Charrier incarnées respectivement Jean Seberg et Gisèle Halimi.  
 
Aviez-vous déjà écrit pour la télévision avant L’enchanteur ?
Maria Pourchet : j’avais auparavant travaillée sur un documentaire et œuvrée sur une saison 2 d'une série de Guillaume Nicloux qui au final n'a pas eu de suite. Donc, je n’avais rien en fait en télévision et travaillé à ce jour rien que pour le cinéma, sur Nouveau départ de Philippe Lefebvre, qui sort très bientôt. Et sur le dernier film de David Moreau, King

François-Henri Désérable : Je n’avais jamais écrit de scénario auparavant. J’en avais beaucoup lu auparavant et appris par cœur celui de Wiplash de Damien Chazelle.

Vous plongez dans un univers, le monde littéraire parisien, rarement raconté au cinéma. Et encore moins en télévision. Comment vous êtes-vous retrouvé dans l’aventure de L’enchanteur. Et pourquoi raconter cette histoire autour de Romain Gary ?
M.P : C’est Médéric Albouy qui me l’a proposé. C’était une histoire à laquelle il tenait car c’est un grand admirateur de Romain Gary, tout comme moi. Il connaissait le travail de François-Henri et son intérêt également pour Gary. Et il lui apparaissait évident que je ne fasse pas ce projet tout seule et que je le fasse avec François-Henri. Qui avait un regard d’expert sur ce sujet. Nous sommes amis depuis plusieurs années et nous nous sommes rencontrés sur ce sujet et il a de suite embarqué. Cette histoire faisait au début une page. Et c’est resté le même point de départ. Tous nos choix narratifs ont été ensuite respectés par la production et par la chaîne.

Et dans le cas de Philippe Lefebvre ?
M.P : Sur son film Nouveau départ, je voyais comment il travaillait, sa générosité, à quel point c’était fluide et que les gens l’aimaient. Il a une grande expérience télé également. J’avais l’impression que notre entente serait idéale pour L’enchanteur. Il y a eu un bel alignement des étoiles. La télé, ce n’est pas censé être cela, et dans ce cas précis, il y a eu une espèce de petite magie autour de ce texte et de ce projet.

On n’attendait pas forcément Philippe Lefebvre dans cet univers, il est très marqué par la comédie ?
M.P : Pour nous, Adèle est quelqu’un de très drôle, et la comédienne Claire de La Rüe du Can
a une vraie vis comica. C’est quelque chose que Philippe sait regarder. Il a fait aussi Ne le dis à personne et il attendait qu’on lui propose quelque chose de différent. Et il a embrassé ce projet avec générosité et empathie.
Avez-vous œuvré sur le casting. Aviez-vous des souhaits ou des envies ?
M.P : Il y a quelques années quand je disais que je ferais un jour un film sur Romain Gary, j’avais des noms en tête. Et Charles Berling en faisait partie. Sur ce film-là, c’est Médéric Albouy, Philippe Lefebvre et la chaîne qui ont tranché. J’ai été profondément émue en découvrant Charles Berling au maquillage sur le plateau. Comme moi, c’est un amoureux de Romain Gary. Il savait ce qu’il jouait. On a rencontré un acteur et un lecteur de Gary. Il y avait un mélange de douceur, d’angoisse et d’humour dans son regard. Il avait le même éclat que Gary.

F-H D : J’ai commencé à être ému avant même le tournage en découvrant les costumes de Gary. Et j’ai été frappé par la ressemblance frappante de Charles Berling en Romain Gary. Il a compris qu’il était capable de tenir à distance le tragique de l’existence grâce à l’humour. Gary disait que « l’humour était l’arme blanche des hommes désarmés ».Berling a très bien saisi tout cela.
 
Pour le personnage d’Adèle, c’est une pensionnaire de la Comédie Française, Claire de La Rüe du Can, qui a été choisie alors que celle-ci n’avait jamais tourné dans une fiction ?
M.P : Dès les essais, elle a très vite fait l’unanimité. Une part d’elle avait été je pense l’équivalent de ce personnage. En effet, elle n’a pas un jeu, et cela colle parfaitement au rôle. Il y a une petite magie sur ce tournage qui nous a sorti des logiques habituelles. Je pensais qu’il y aurait des vétos sur à peu près tout et en fait non. La présence de la chaîne a été dans la confiance.

F-H D : Jamais la chaîne n’est venue contrariée nos ambitions artistiques.
 
Qu’est-ce que vous avez retenu de cette première expérience sérielle ?
F-H D : J’ai retenu à quel point pour moi ce travail collectif avait été fécond intellectuellement et artistiquement en allant limer sa cervelle à celle de Maria. J’écris mes livres seuls. Et là, j’ai vu cette émulation, ce ping pong intellectuel. Je savais qu’elle avait du talent, j’ai découvert qu’elle avait du génie.

M P : La littérature est un exercice sauvage et isolé. Là, c’est un bonheur de trouver une équipe avec laquelle on potentialise ce que l’on sait faire. Je n’aurais pas pu faire ce film seule. Et jamais imaginé une relation aussi riche entre des écrivains et le service public. Nous avions tous deux cette fascination pour Gary. François-Henri en a fait un livre finaliste au Goncourt (Un certain M. Piekielny (2017, Gallimard), est une enquête littéraire sur les traces de l'auteur des Racines du Ciel, ndlr). Même là, cela peut rester confidentiel. Là, le fait d’être parvenu grâce à Anne Holmes et Anne Didier, à être à ce niveau de transmission et de partage autour d’un fait culturel qui fonde notre histoire culturelle est enthousiasmant.
 

Francois-Pier Pelinard-Lambert
© crédit photo : FTV


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