
[Exclusif] Congrès FNCF 2025 - Hexacom scrute la fréquentation des cinémas de proximité et des salles de circuit dans les grandes agglomérations
Date de publication : 23/09/2025 - 08:10
Dans une étude commandée par le Syndicat des cinémas de proximité, le cabinet d’études et de conseil livre "une analyse comparative de l'évolution de la fréquentation des cinémas de proximité et des établissements de la grande exploitation dans les grandes agglomérations françaises", Paris excepté.
Il y a quelques jours, le Syndicat de l’exploitation cinématographique du centre-sud, fondé en 1946 et présidé depuis plusieurs années par Jean Villa, dévoilait son nouveau nom, Syndicat des cinémas de proximité, reflet de la « nouvelle identité » que souhaite adopter l’organisation. Cette dernière en profitait alors pour annoncer, à l’heure où "l’avenir des salles de cinéma de proximité suscite de vives inquiétudes", la publication d’une étude commandée auprès du cabinet Hexacom, intitulée "Analyse comparative de l'évolution de la fréquentation des cinémas de proximité et des établissements de la grande exploitation dans les grandes agglomérations françaises sur la période récente", que nous nous sommes procuré.
"Avec une baisse de près de 26% de leur fréquentation entre 2019 et 2024 (à périmètre constant), les établissements de la grande exploitation peinent à retrouver un niveau de fréquentation comparable à celui d’avant la crise sanitaire, alors que les cinémas de la petite exploitation affichent des résultats proches de 2019, voire les dépassent pour certains. La grande exploitation établit un lien entre l’amplification des plans de sorties depuis la fin des VPF constatée par l’ensemble du secteur (…) et l’intensité de la concurrence dans le territoire concerné, avec pour conséquence un risque d’affaiblissement de la diversité et un transfert des entrées des établissements qui ont vocation à drainer un large public (les multiplexes) vers les cinémas de proximité", recontextualise l’étude en préambule.
C’est dans ce contexte que le Syndicat des cinémas de proximité a souhaité disposer d’une étude pour "objectiver l’évolution de la fréquentation dans les zones urbaines en fonction de la densité de cinémas de proximité en situation de concurrence avec des établissements de la grande exploitation", signale Hexacom.
A cette fin, le cabinet a comparé, dans les 35 unités urbaines Insee – hors Paris – qui comptaient plus de 200 000 habitants en 2022*, la fréquentation 2024 des cinémas et des agglomérations concernés à la moyenne annuelle de leurs entrées sur les années 2017 à 2019, circuits itinérants exceptés.
Afin d’opérer ces comparaisons, Hexacom a classé les sites concernés en quatre catégories : les cinémas de proximité (une à trois salles et moins de 70% de séances de films art et essai), les cinémas art et essai (au moins 70% de séances de films recommandés), les cinémas indépendants généralistes (quatre écrans et plus, moins de 70% de séances de films art et essai) et les cinémas généralistes des grands circuits d’exploitation (appartenant à Pathé Cinémas, CGR Cinémas, UGC, Megarama, Kinepolis, Cinéville, Cinéwest et Grand Écran et proposant moins de 70% de séances de films recommandés). Les unités urbaines ont, quant à elles, été classées en fonction de la place que les cinémas de proximité y occupent : fortement équipées (10), moyennement équipées (13) et peu ou pas équipées (12).
"Aucun lien de cause à effet entre la dynamique de fréquentation" des cinémas de proximité et des salles de circuits
Première observation : "l’analyse de l’évolution de la fréquentation des cinémas de proximité et des cinémas généralistes des grands circuits dans les grandes agglomérations françaises entre les années 2017 à 2019 et 2024 ne fait apparaître aucun lien de cause à effet entre la dynamique de fréquentation des premiers et celle des seconds", soutient Hexacom.
En effet, avance l’étude, "une très grande diversité de situations sont représentées (forte baisse des entrées des cinémas généralistes des grands circuits et hausse modérée de celles des cinémas de proximité, net recul de la fréquentation des cinémas généralistes des grands circuits et augmentation importante des entrées des cinémas de proximité, diminution modérée de la fréquentation des deux catégories, etc.) et ce, quelle que soit la catégorie d’unités urbaines concernée".
A titre d’exemple, la fréquentation des cinémas de proximité de l’unité urbaine d’Avignon a augmenté de 9,8% entre la moyenne 2017-2019 et 2024 tandis que l’affluence des établissements généralistes des grands circuits y a chuté de 25,5% sur la même période. De leur côté, les cinémas de proximité de l’unité urbaine de Nice ont vu leurs entrées reculer de 19,3% entre la moyenne 2017-2019 et 2024, alors que la fréquentation des établissements généralistes des grands circuits a diminué de 14,8% sur la période. Toutes deux sont classées parmi les unités urbaines fortement équipées en cinémas de proximité. On relève par ailleurs, au sein des unités urbaines peu ou pas équipées en cinémas de proximité, des chutes de fréquentation très prononcées pour les établissements généralistes des grands circuits : -41,1% au Havre, -33,7% à Reims, -33,2% à Nancy…
Parallèlement, "les chiffres [comparatifs] permettent également de constater qu’en valeur absolue, les ordres de grandeur des évolutions des entrées des cinémas de proximité et des cinémas des grands circuits ne sont absolument pas comparables", signale Hexacom. En effet, exception faite de l’unité urbaine de Lille, au sein de laquelle Le Pont des Arts de Marcq-en-Barœul, ouvert en 2021, a écoulé près de 220 000 tickets en 2024, "les plus fortes hausses de fréquentation [des salles de proximité] sur la période observée ne dépassent pas les 30 000 entrées, là où les pertes des cinémas des grands circuits se comptent la plupart du temps en centaines de milliers d’entrées", et même jusqu’à un million à Lyon (versus 7 811 entrées en plus pour les cinémas de proximité de son unité urbaine sur la même période).
"La comparaison de l’évolution de la fréquentation des cinémas de proximité et des cinémas généralistes des grands circuits dans les grandes agglomérations françaises entre la période pré-Covid (2017-2019) et la situation en 2024 permet d’affirmer qu’il n’y a pas de lien de causalité − ni même de corrélation − entre les dynamiques de fréquentation de ces deux catégories de cinémas et ce, quel que soit le niveau d’équipement des unités urbaines concernées en salles de proximité", conclut l’étude Hexacom. Autrement dit : "les difficultés que rencontre actuellement la grande exploitation dans les grandes agglomérations ne peuvent être imputées aux cinémas de proximité".
Quid de l'impact des cinémas indépendants généralistes ?
Aussi, selon le cabinet, "la situation actuelle des cinémas généralistes des grands circuits est probablement multifactorielle : déficit d’attractivité de l’offre de films américains, politique tarifaire dans un contexte d’inflation et de baisse de pouvoir d’achat des ménages (qu’elle soit réelle ou ressentie), concurrence accrue du streaming depuis la pandémie, essoufflement d’un modèle (accéléré par la crise sanitaire mais déjà amorcé avant) ou encore – et peut-être surtout – changements survenus dans le paysage concurrentiel local".
Car, estime Hexacom, "dans plusieurs grandes unités urbaines, le recul de la fréquentation de certains établissements de la grande exploitation s’explique par une évolution récente du parc". Et de prendre l’exemple des 14 salles du Kinepolis de Mulhouse, dont la chute de fréquentation (-40% entre 2017-2019 et 2024) "résulte très probablement" de l’ouverture des sept écrans du Ciné Croisière de Cernay fin 2021.
En conséquence, juge le cabinet, "il pourrait être intéressant d’examiner, au cas par cas, l’impact de l’évolution de la fréquentation de la catégorie des cinémas indépendants généralistes sur celle des cinémas généralistes des grands circuits dans les grandes agglomérations sur la période post-Covid".
"Cette étude vient bousculer certaines idées reçues, réagit le Syndicat des cinémas de proximité. [Elle] viendra assurément alimenter les réflexions du comité de concertation [distributeurs-exploitants] récemment mis en place par le CNC".
*Chambéry, Brest, Pau, Perpignan, Caen, Reims, Le Mans, Le Havre, Mulhouse, Angers, Dijon, Bayonne, Clermont-Ferrand, Nancy, Orléans, Metz, Valenciennes, Béthune, Tours, Saint-Étienne, Rennes, Grenoble, Avignon, Rouen, Montpellier, Strasbourg, Douai-Lens, Toulon, Nantes, Nice, Bordeaux, Lille, Toulouse, Marseille-Aix-en-Provence et Lyon.
Kevin Bertrand
© crédit photo : Frédéric Berthet
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