Cinéma

Lumière MIFC 2022 - Les ventes et rachats de films et de catalogues sur la table

Date de publication : 20/10/2022 - 08:10

Le point technico-juridique du colloque du MIFC se consacrait cette année aux enjeux des transactions autour des films classiques et des catalogues, dans un contexte actuel d’accélération des acquisitions. L’occasion de dispenser plusieurs conseils pratiques tout en dégageant quelques perspectives.

La salle du Karbone hébergeait, ce mercredi 19 octobre, le traditionnel point juridico-technique du MIFC, anglé cette année autour de la thématique : Revente et rachat de films ou de catalogues : quels enjeux ? quelles perspectives ?
La table-ronde réunissait ainsi maître Eric Lauvaux, avocat au Cabinet Nomos, Diane Cesbron, Dg de Cinecapital, le réalisateur et producteur Bertrand Van Effenterre (Mallia Films), et Sabrina Joutard, directrice adjointe du catalogue chez Pathé Films ; et la modération était ainsi assurée par Isabelle Meunier, responsable du service de négociation des contrats de production audiovisuelle à la SACD.

Si les échanges, axés pratiques, ont surtout tournés sur le partage d’expérience de chacun des intervenants, ils furent tout de même l’occasion de partager de nombreux conseils, alertes et recommandations. Ce fut le cas notamment sur le terrain juridique, lors de la présentation par maître Eric Lauvaux des audits juridiques dans le cadre des ventes de films, de catalogues, de fonds de commerce voire de sociétés.

Renouvellement des droits
L’avocat a ainsi souligné l’attention à apporter sur plusieurs éléments des contrats de cession, à commencer par l’historique contractuel de la constitution du catalogue. Le tout, en identifiant plusieurs risques possibles auxquels s’exposent à la fois acquéreurs et vendeurs, tels notamment la durée de protection des œuvres originales dans les cas d’adaptation audiovisuelle, la durée et les rémunérations liées aux contrats d’auteurs, et le renouvellement des cessions de droits, mais également les cessions de droits musicaux, qui forment des cas à part, ou encore le cas particulier des productions en cours.

"On constate très souvent des catalogues qui sont exploités alors que le renouvellement des droits n’a pas été négocié", témoigne l’intervenant. Or, "il est évident que si vous achetez un catalogue parce que vous souhaitez l’exploiter, il vous faut pouvoir le faire le plus longtemps possible".

Prix de ventes
L’intervention de Diane Cesbron permit ensuite d’explorer tout l’aspect de la valorisation des ventes, l’occasion aussi de relever plusieurs points autour de la fixation des prix. "Celui qui va acheter n’a peut-être pas la même vision [que le vendeur] du schéma d’exploitation [du catalogue] et sa capacité à le positionner chez un diffuseur", a pointé la dirigeante. Et celle-ci de relever aussi l’importance de prendre en compte la temporalité dans laquelle l’acheteur projette ses revenus.

"Il faut rappeler qu’un catalogue a aussi la valeur humaine de la personne qui a produit ces films. Et qui a un attachement à ses auteurs. Certains catalogues ont parfois une immense cohérence artistique, et les producteurs n’auront pas forcément envie d’aller vendre à certains acheteurs pour protéger leur relation avec les auteurs et leurs œuvres."

Comme l’historique des dettes, les passifs en cours, ou mêmes les projets encore en développement ou en production, tout peut ainsi influer sur la perception de la valeur du catalogue ou de la structure vendus. "Il y a un vrai travail préliminaire à faire, qui prend du temps mais qui est essentiel », car il permet au vendeur d’anticiper d’éventuelles décotes de valeur.

"S’assurer que les films vivent"
L’intervention de Bertrand Van Effenterre s’est surtout concentré sur son expérience de la vente du catalogue de Mallia Films. "Ma volonté première n’était pas de gagner de l’argent, mais de m’assurer que les films vivent après moi", a-t-il témoigné.
Pour sa part, Sabrina Joutard a livré plusieurs analyses sur les opportunités et risques des rachats de catalogue. Et notamment l’attention à porter, avec la plus grande minutie, à l’élément matériel de la transaction. "Les droits d’un catalogue sans le matériel ne valent rien. Or, c’est un élément souvent minoré par le vendeur. Un inventaire technique mal fait peut se révéler très couteux pour l’acquéreur."

Et l’intervenante de souligner l’importance à attacher aux éléments non-filmiques, "souvent difficiles à récupérer", mais qui peuvent revêtir une importance capitale dans la conservation et la restauration de l’œuvre, ainsi que ses revalorisations futures.

La loi en question
Au rang des perspectives évoquées, une grande partie de la table-ronde fut consacrée à la loi de 2021 autour de la notification préalable du ministère de la Culture dans le cadre des obligations de recherche d’exploitation suivie des œuvres. Avec de nombreuses interrogations autour de la « commission d’accès aux œuvres », évoquée dans un décret mais, semble-t-il, pas encore formée par les pouvoirs publics. Tout en alertant sur un effet de surcharge administrative liée à la mise en pratique de cette loin, dont les formulaires et protocoles ne sont pas clairement définis selon les intervenants. Une critique générale fut d’ailleurs formulée quant aux délais et échéances temporelles prévues par les textes. "Une clause de revoyure est prévue, mais à se stade, aucun bilan n’a été fait", a pointé Sabrina Joutard.

Avec l’ouverture des débats au public, la question de l’information des auteurs quant au devenir et au stockage des éléments matériels des films, et notamment les masters, négatifs ou fichiers numériques, a été longuement explorée. Ainsi qu’une alerte fut émise par rapport aux conditions de conservation des œuvres produites en tout numérique, sans retours argentiques, ni réversibilité des données dans le cadre d’obsolescence matérielle ou logicielle.

Sylvain Devarieux
© crédit photo : Warner Bros.


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